LIVRE

« Approche ostéopathique du nouveau-né, la face cachée d’une vie de bébé »

Arnaud LAFORGE


Cet ouvrage est une invitation à venir découvrir ce qui est enfoui dans les tissus des bébés et ce dès leur naissance. Au-delà de ce qui est visible, les bébés ont effectivement bien des histoires à raconter sur leur parcours de vie, tant au niveau physique qu’émotionnel. L’aventure de leur vécu devient passionnante à la lecture des fascias, telle qu’Arnaud Laforge le retranscrit.

Edition Sully : https://www.editions-sully.com/l-252-approche,osteopathique,du,nouveau,ne.html

EXTRAIT

INTRODUCTION

L’envie d’écrire un livre sur les bébés m’est venue d’une réflexion autour de ma pratique ostéopathique, qui, avant d’être exclusivement dirigée vers les bébés, était ouverte à tous types de patients : comment se fait-il qu’il y ait autant de similitudes dans l’organisation lésionnelle tissulaire d’un adulte, d’un adolescent, d’un enfant, ou d’un bébé qui vient de naître ? Certes, la qualité tissulaire n’est pas la même chez l’adulte et chez le nouveau-né, mais quel que soit l’âge, je retrouve, inscrits dans les tissus des réactions densitaires édifiées à partir de stress. Or, si les nouveau-nés ont des densités tout comme leurs ainés, c’est sans doute que des événements antérieurs à la naissance en sont responsables.

L’enquête – plus aisée chez les petits que chez les adultes, car moins chargée en événements traumatiques – peut alors commencer. Quels peuvent-être ces événements ? Quel sens donner à leurs mémorisations ? En quoi viennent-ils amputer la santé des bébés ? Les impacts de la grossesse et de la naissance sur les comportements et les fonctions des bébés lors des premiers jours de vie, puis sur les enfants jusqu’à l’âge adulte, sont largement reconnus par la corporation des ostéopathes. Pour autant, les effets, sur la santé des bébés, leur vie anténatale, ou leurs toutes premières semaines de vie me semblent encore largement mésestimés, sans doute parce qu’incomplètement compris et expertisés sous toutes leurs formes.

Parallèlement, en avançant dans la vie j’ai été amené à me questionner sur les interactions qui avaient structuré ma propre construction psychique, et qui perturbaient ma relation à l’autre, et, en particulier, celle que j’entretenais avec mes patients. En effet, une séance d’ostéopathie est un échange sensoriel intime. Or, rien ne peut être caché aux bébés. Mes lectures dans le domaine de la psychanalyse, le travail que j’effectue – et effectue encore – sur moi, ainsi que la formation que j’ai reçue en hypnose éricksonienne, m’ont progressivement ouvert les yeux sur l’importance de l’impact psychosomatique des stress, et des manières plus adéquates de communiquer avec la diade mère-enfant. Dans ma posture de soignant et de formateur, j’intègre ainsi à ma pratique ostéopathique, sans la dénaturer, des notions de psychologie spécifiques au bébé, plus solides que celles que j’avais mises en place auparavant.

La face cachée d’une vie de bébé est une invitation à découvrir ce qui est enfoui dans les tissus des bébés. Leurs tissus recèlent, en effet, des secrets, qui sont révélés aux thérapeutes à la seule condition qu’ils soient justes. Cet ouvrage est d’abord conçu pour aider les ostéopathes à choisir un meilleur angle pour aborder les bébés, et s’ouvrir à d’autres perspectives : par exemple, considérer le bébé et sa famille, avant de se focaliser sur son symptôme, ou se poser des questions essentielles quand on sait l’importance du « lien » et de la communication infra-verbale. Comment regarder un bébé ? Comment l’aborder physiquement dans le respect de sa personne ? Pourquoi et de quelle manière nous émeut-il ? Plus généralement, ce livre vise à améliorer l’interaction mère-enfant qui est une donnée indispensable pour « cultiver » la santé ?

Ce qui m’a motivé à l’écriture, c’est l’envie de partager ma connaissance des petits acquise par des années de pratiques et, articulée à tout ce que m’ont enseigné Robert Rousse, Dany Heintz-Blondy, Eric Simon, et Jean-Marie Michelin dans le domaine de la petite enfance.

Ce livre est aussi un complément d’informations de ma formation « Gynobpsy’d Tissulaire », destinée aux professionnels de santé. Il a ainsi été conçu dans un format qui reprend le déroulement d’une séance d’ostéopathie, en commençant par l’anamnèse, et en finissant par le traitement.

Je suis conscient que le parti-pris d’étudier l’histoire « lésionnelle » du bébé, à partir du jour de consultation, peut produire de la confusion dans les esprits, puisque l’étude que j’en fais, est de fait, rétroactive. La raison en est que les tissus du bébé, sous les appuis de l’ostéopathe et par un processus actif, se défont successivement des entraves les plus récentes, puis des plus anciennes. Laisser parler les tissus dans l’état où ils sont connectés, plutôt que d’être dans une logique analytique chronologique, me semble donc plus conforme à leur transcription, telle qu’en ostéopathie je peux la recueillir.

Je n’ai pas la prétention d’avoir écrit un ouvrage pédiatrique, car il ne traite que de la période que j’ai volontairement restreinte aux premières semaines de vie du nouveau-né. Le centrage sur cet âge précoce, permet de discerner, grâce à une qualité tissulaire relativement fluide, « les organisations lésionnelles » dont les densités, les postures anténatales, et les accolements sont les pivots.

Ce livre est également destiné, aux parents désireux d’en savoir plus sur ce que porte le bébé dit « en bonne santé » et les raisons de leur inconfort. En effet, à chaque séance, les parents me montrent leur soif d’informations, leur désir de comprendre, d’être de « bons parents ». C’est la raison pour laquelle je propose une vertébration qui favorise l’accessibilité à tous, et c’est dans cette intention que deux chapitres précisent des notions spécifiques et indispensables à la compréhension de l’ensemble.

J’ai pensé également aux autres professionnels de santé, liés au domaine de la petite enfance, ou à tous ceux qui, profitant de cette thématique passionnante, sont désireux d’en connaître un peu plus sur les moyens mis en œuvre par l’ostéopathie.

La diversité de ces publics explique pourquoi on y lira, non seulement des récits de cas cliniques, mais également des réflexions, des recommandations aux parents, ou encore des précisions pour mes consoeurs et confrères.

Mon intention est, et c’est ce qui contribue à l’originalité de l’ouvrage, de vous faire vivre une consultation ostéopathique infantile comme si vous y étiez, et de suivre la logique des tissus telle qu’ils me parlent, afin que, si le cœur vous en dit, vous puissiez vous mettre tour à tour, à la place du bébé, du parent ou du thérapeute. La logique de la santé à ce tout jeune âge étant assez complexe, j’ai fait le choix d’un découpage didactique pour aider tous les profils de lecteur à s’y retrouver dans cette aventure thérapeutique dans un style qui utilise l’analogie et la métaphore pour mettre en image le « perceptuel ».

Ce livre est un plaidoyer pour la prévention. Selon W. Reich, « La civilisation commencera le jour où le bien-être du nouveau-né l’emportera sur tous les autres »[1]. La prévention est possible à tous les âges, mais si une expertise tissulaire rigoureuse est envisageable, c’est à cet âge précoce, qu’en toute logique, elle devrait être mise en place, au même titre que les expertises médicales. La santé et le bien-être du jeune enfant, de l’adolescent et de l’adulte en dépendent. Alors, j’avertis le lecteur que, lors de l’anamnèse entre autre, j’ai un discours quelque peu dénonciateur, donc, de fait, peu rassurant, qui pourrait discréditer mes propos et ma profession. Cette attitude vous paraîtra peut-être décalée dans le contexte de l’anamnèse, mais en fait elle anticipe ce que je traduis des messages qui sont enregistrés dans la profondeur des tissus.

Laissez-moi vous débarrasser de quelques préjugés et autres idées reçues sur la vie idyllique des bébés. Laissez-moi vous guider dans un monde intérieur subtil où le maintien des équilibres et des fonctions est pour son organisme un combat permanent. Au-delà de l’image merveilleuse de perfection des nouveau-nés, il y a une réalité tissulaire, moins enviable pour un grand nombre d’entre eux. Même si cette réalité ne joue pas sur le pronostic vital, elle n’en est pas pour autant anodine dans une conjoncture de développement. En ce qui concerne la définition du « nouveau-né en bonne santé », sans désavouer l’expertise médicale, l’ostéopathie s’en démarque en recherchant les causes des « dysfonctions précoces », afin de mieux les traiter.

[1] Reich W., Ecoute petit homme, ed Poche, 2001.